« (…) vivement te voir en chair et en os ».
Ce sont les mots que j’ai le plus écrits ces derniers mois. Expérimentant par-là, la réjouissance du jour où nos corps et nos êtres dans leurs présences physiques pourraient à nouveau se côtoyer. Exprimant également maladroitement la solitude dans laquelle, leurs absences me laissaient.
Sophie Linsmaux, mai 20 (confinement 1)
La peur, la mort, la pandémie a occupé nos quotidiens ces derniers mois, de manière prégnante ; ce que nous voulons par ce spectacle, c’est galvaniser chez le spectateur, le besoin incompressible de lien à l’autre et l’impulsion de vie qui en découle. C’est très précisément le sentiment d’incomplétude qui accompagne nos solitudes qui a déclenché l’écriture de ce spectacle aujourd’hui. Mais surtout la pulsion de vie qui, par ce manque, peut être réveillée et émerger chez chacun de nous. Car, nous en sommes persuadés, il est urgent d’entretenir nos élans de vie, il en va de notre (sur)vie à tous.toutes face à ce monde, de plus en plus effrayant.
Le corps de l’homme est sa racine identitaire, c’est sa chair qui incarne son être-au-monde. Ce corps est bien plus qu’une simple enveloppe architectonique de matériaux organiques. Il est l’ancrage vivant, animé, il est la chair.
Pourtant, cet ancrage du corps tend à disparaître. La chair de l’homme est la part maudite vouée au vieillissement, à la mort, à la maladie. Elle est la « charogne », la « viande ». Elle traîne dans nos pattes. La formule moderne du corps fait de celui-ci un reste : lorsque l’homme est coupé du cosmos, coupé des autres et coupé de lui-même.(1)
Au travers de FLESH, c’est la pulsion de vie que nous voulons faire éclater sous le regard des spectateurs. La vie est un risque inconsidéré pris par nous, les vivants (2) . Notre théâtre visuel et sans mots prend le risque de s’emparer de la chair pour révéler le besoin du collectif, la nécessité du lien entre les individus. Sans cesse, dans notre théâtre et davantage dans FLESH, il nous importe de marteler ce besoin de relation de lien avec autrui, avec l’espèce humaine, retrouver cette relation de confiance envers nous-même et envers l’autre ; nous sommes tous des risques les uns pour les autres (3).