Un homme (ou un couple) en quête de verdure et de calme se trouve(nt) un petit coin de paradis perdu. Iel(s) y installe(ent) une tente, des chaises pliables et autres objets et s’apprête(nt) à savourer ce moment de paix et de communion avec la nature, lorsque, sorti de nulle part, arrive un autre individu qui s’installe à proximité.
Entre bienséance et masque social, les rapports sont tout d’abord cordiaux, mais c’est sans compter sur les profondes pulsions qui sommeillent en nous.
Quand les un·es souhaitent faire une sieste tandis que l’autre met la musique à fond, le camping vire vite à la sauvagerie.
Ce qui devait être un moment de détente devient alors une lutte de pouvoir, un jeu de domination, un règlement de comptes…
Jusqu’où sommes-nous prêt·es à aller pour satisfaire nos désirs, ne pas perdre la face ou encore défendre notre territoire ou nos biens ?
Spectacle de danse-théâtre adressé au jeune public, Camping Sauvage aborde la question du vivre-ensemble et de la mixité culturelle sur un ton léger, sans pour autant éviter les aspérités du sujet.
Ceci est un scénario possible comme point de départ de la recherche mais il pourra éventuellement prendre d’autres directions au fur et à mesure que les choses se précisent dans le travail, à travers des improvisations.
La dramaturgie du spectacle se construira au fur et à mesure que l’écriture chorégraphique et scénique se définira.
Ce qui m’intéresse dans le « vivre-ensemble »
Le vivre ensemble n’est pas inné, c’est un apprentissage qui se fait dès le plus jeune âge, il suffit d’observer les pulsions agressives du bébé ou du jeune enfant qui va à la crèche : iel tire allègrement les cheveux de son ou sa camarade ou le·la mord férocement parce qu’iel a tenté de prendre un jouet.
Ce sont des pulsions liées aux frustrations, à la colère qu’il faut petit à petit apprendre à gérer, à maîtriser pour que la vie en société soit possible.
Que ce soit en famille, en couple ou en société, nous entretenons rarement des relations sans aucune discorde, aucun malentendu, qui ne génère aucune tension ou déception.
Bien sûr ces relations sont également une source inestimable de joie et de bonheur et c’est ce qui fait du « vivre ensemble » un vaste et complexe sujet qu’il n’est pas aisé d’approcher car il touche toutes les sphères de l’être : la sphère intime, publique et globale.
Il est d’autant plus complexe aujourd’hui dans nos sociétés dites multiculturelles et dans un monde hyper connecté dans lequel l’information circule à une vitesse effrénée.
Quelques questions liées à cette thématique
Que cela implique t’-il de partager un même espace avec d’autres, notamment avec des inconnu·es ?
Où se trouve la frontière entre l’espace intime, privé, personnel, et l’espace public ?
Comment le regard des autres change notre attitude ?
Comment chacun·e habite un espace par sa présence, ses gestes, sa manière de bouger et de danser, par son regard ?
Comment la rencontre se fait-elle ?
Comment gérer les conflits ?
Autre aspect qui m’intéresse : le « masque » social
Extrait du livre « La mise en scène de la vie quotidienne » du sociologue Ervin Goffman :
Ce n’est probablement pas par un pur hasard historique que le mot personne, dans son sens premier, signifie un masque. C’est plutôt la reconnaissance du fait que tout le monde, toujours et partout, joue un rôle, plus ou moins consciemment. (…) C’est dans ces rôles que nous nous connaissons les uns les autres, et que nous connaissons nous- mêmes.
Nous sommes donc toustes dans des rôles, portons un masque social, consciemment ou inconsciemment. Dans le cadre de cette création, il sera intéressant d’explorer cette dimension de personnage dans des rôles sociaux distincts, qui peuvent être interchangeables selon les situations, tels que par exemple : dominant ou dominé·e, sociale ou asociale, respectant les normes ou se rebellant, incarnant l’autorité ou la défiant. Ces mécanismes d’interaction entre individus sont au coeur du cinéma burlesque notamment.
Les sources d’inspiration dans ce domaine ne manquent d’ailleurs pas, que ce soit dans les films de Buster Keaton, de Charlie Chaplin ou de Jacques Tati.
Le registre de mouvement « burlesque » et la caractérisation du personnage qui y est associée sera une piste d’exploration possible.
Par ailleurs, les différents objets qui serviront à créer l’environnement scénique et à définir des espaces dans l’espace (cartons, tentes, chaises, rubans de démarquage, barrières improvisées ou autres…) pourront servir de support à l’exploration gestuelle des interprètes, à un jeu d’apparition et disparition de personnes, de parties de corps et de détournement de ces objets…