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Funérailles d’hiver

Michael DELAUNOY

En bref

Que peut-il se passer quand, au même moment dans une famille, un mariage et un enterrement s’apprêtent à être célébrés ? Simultanément. Quand la réalisation d’un projet pensé toute une vie doit être retardé par un événement imprévu : la disparition d’un proche.
Funérailles d’hiver, c’est l’histoire d’une grande échappée. Une échappée fantastique et burlesque déclenchée par la concomitance malheureuse de deux évènements majeurs. À gauche, la cousine Shratzia marie sa fille unique Vélvétsia avec Popotshenko. Les invités sont là, les huit cents poulets rôtis sont commandés. Les beaux-parents dorment dans la maison de la fiancée, paisiblement, en attendant les sacro-saintes noces. À droite, le cousin Latshek Bobitshek, tête basse, pleure sur la mort de sa mère. Avant qu’elle ne le quitte, elle lui a fait promettre  un bel enterrement, en présence de toute la famille. Le voilà donc parti nuitamment, et sous une pluie battante, annoncer la terrible nouvelle à Shratzia et consorts.
C’est alors que la famille décide de prendre ses jambes à son cou afin d’éviter l’annonce de l’incommodante nouvelle. Et la fuite commence… Une fuite totale et absolue… De la plage de Tel- Aviv aux sommets de l’Himalaya, les voilà tous contraints à un triathlon inédit avec épreuves de course à pied, de vol en plein ciel et d’escalade à mains nues. On court, on court, mais personne ne s’arrête… Seul un ascète bouddhiste a pris racine sur les hauteurs du monde. Pour le reste, tout est fuite en avant : les gens, les choses, les idées, les décors, les codes du théâtre, la politesse, la retenue… Les corps se déballonnent bruyamment au moment de la mort…Tout fout le camp.

En pratique

Un rôle féminin et un rôle masculin sont ouverts aux membres du Centre des Arts scéniques
Rencontre Professionnelle: du lundi 05 au vendredi 09 mars. Date limite d’inscription: dimanche 25 février 2018
Répétitions: à Neuchatel (Suisse) du 30 juillet au 19 août, à Bruxelles du 22 octobre 10 novembre, à Neuchatel du 11 au 20 novembre 2018
Représentations: à Neuchatel les 21 et 22 novembre, tournée en Suisse du 24 novembre au 8 décembre, à Bruxelles du 8 au 23 janvier 2019  (raccord à Bruxelles du 2 au 7 janvier). Tournée potentielle en Wallonie: le 25 janvier à Marche, le 27 janvier au Festival Paroles d’Hommes
Une production de la Compagnie du Passage (Neuchâtel) et du Théâtre le Rideau (Bruxelles)

A propos de Michael DELAUNOY

Formé au Conservatoire Royal de Bruxelles, il travaille dans les plus importants théâtres de Belgique francophone, mais aussi en France, Italie, Suisse, Québec avec le souci de placer la parole et le corps au centre de l’attention du spectateur, d’interroger l’intime dans son rapport au monde.
Il aborde Büchner, Tchekhov, Strindberg, von Horváth, Adamov, Crommelynck, Duras, Beckett mais aussi de nombreux contemporains : Patrick McCabe, David Harrower, Ascanio Celestini, Luca De Bei, Enzo Cormann, Xavier de Guillebon, Christophe Pellet ou encore les belges Paul Pourveur, Pietro Pizzuti, Laurence Vielle et Serge Demoulin, dont « Le Carnaval des ombres » (plus de 130 représentations à ce jour) qui remportera en 2012 le prix du meilleur seul en scène aux Prix de la critique de Belgique francophone.
En 2005, aux mêmes Prix de la critique, sa mise en scène de « Aïda vaincue » de Kalisky reçoit quatre récompenses dont celle du meilleur spectacle. Il est également nommé quatre fois aux Prix de la critique comme meilleur metteur en scène, dont récemment en 2015 pour « La Ville de Martin Crimp ». En avril 2016, il crée « Warda » de Sébastien Harrisson, une production réunissant des acteurs belges et québécois qui s’expriment en français, anglais, néerlandais et arabe. Il s’intéresse depuis toujours aux rapports entre théâtre et musique et propose Maldoror en 2000 avec le compositeur liégeois Michel Fourgon, théâtre musical d’après Lautréamont, et en mars 2013 la création mondiale de « Lolo Ferrari » à l’Opéra de Rouen.
Il est professeur d’art dramatique à l’Ecole Supérieure des Arts de Mons et, depuis octobre 2007, dirige le Rideau de Bruxelles, une des principales scènes de création en Belgique francophone, en particulier dans le domaine des nouvelles écritures. Depuis 2014 il est en outre président de la Concertation Permanente des Employeurs des Arts de la Scène en Fédération Wallonie-Bruxelles (CONPEAS).

Distribution

Frank ARNAUDON (Rashèss), Pierre AUCAIGNE (Professeur Kipernaï), Robert BOUVIER (Latchek Bobitchek), Muriel LEGRAND (Shratzia), Lee MADDEFORD (Lishtenstein), Laurence MAITRE (Pshoshitsia), Frank MICHAUX / (Angel Samuelov), Thierry ROMANENS (Baragontsélé), Catherine SALEE (Tsitskéva), Philippe VAUCHEL (Rosenzweig). Distribution en cours

Note d'intention

La découverte du théâtre de Hanokh Levin a provoqué chez moi un véritable choc. Ce n’est qu’après la mort du grand dramaturge israélien en 1999 que, comme la plupart des hommes et femmes de théâtre francophones, j’ai pris connaissance de cette œuvre inouïe. Le vingtième siècle avait donc produit un auteur dramatique comparable aux plus grands génies de l’histoire du théâtre, et je n’en avais rien su !
J’ai rattrapé le temps perdu en dévorant tout ce qui était disponible en français, principalement à travers le remarquable travail de traduction de Laurence Sendrowicz. J’ai programmé, comme directeur du Rideau de Bruxelles, deux créations en Belgique de textes de Levin. En tant que pédagogue, j’en ai monté trois autres avec mes étudiants. Le virus Levin m’avait contaminé. Les chances de guérison s’avèrent nulles. Pour mon plus grand bonheur.
Des cabarets satiriques des débuts aux grandes formes épiques de la fin, le théâtre de Levin n’a cessé de se réinventer et d’explorer de nouveaux territoires, avec une audace créatrice rageuse, sourde à tous les conformismes de même qu’aux sirènes de la mode.
La force de Levin réside pour moi avant tout dans le regard sans concession (mais non sans tendresse) qu’il porte sur son temps en revisitant des thématiques quasiment archaïques (le désir, la peur de la mort, la soif de domination, la lâcheté…) et en malaxant le théâtre avec une sauvagerie raffinée jusqu’à lui faire rendre tout son jus.
Levin a une connaissance approfondie du grand théâtre du monde et du théâtre tout court. Mais pas une connaissance abstraitement livresque. Il m’apparaît plutôt comme un anthropophage qui aurait ingurgité Sophocle, Aristophane, Sénèque, Shakespeare, Labiche, Tchekhov, Karl Valentin, Brecht et Beckett. Mais alors que n’importe quel être normalement constitué céderait à une indigestion prévisible à l’issue d’un aussi gargantuesque festin, Levin parvient à produire une œuvre d’une théâtralité profondément personnelle, à un point tel qu’un texte de Levin se reconnaît après quelques répliques à peine.
Dans Funérailles d’hiver, Levin semble réinventer dans une perspective moderne la grande tradition du vaudeville, chansons incluses. La structure de la pièce n’est pas sans évoquer Un chapeau de paille d’Italie, le chef d’œuvre d’Eugène Labiche. Là où la comédie du vaudevilliste français montrait une noce lancée dans une course folle à la poursuite d’un homme (lui-même à la poursuite d’un chapeau !), la farce burlesque de Levin (c’est ainsi qu’il sous-titre sa pièce) montre un homme poursuivant follement une noce, elle-même à la poursuite… de quoi ? D’un mariage sur l’autel duquel tout sera férocement sacrifié. Mais qui s’avèrera au final aussi dérisoire que le chapeau de Labiche : « Oh, comme il est bête et fade, votre amour, quand on pense au mal qu’on s’est donné, à la souffrance que nous a coûtée votre mariage » dira au cours de la noce la mère du marié.
Loin de tourner à vide, la vis comica est ici au service d’une fable qui expose, avec l’implacable violence qui habite tout le théâtre du dramaturge israélien, le combat de deux grands rites qui fondent l’humanité : la cérémonie funéraire et le mariage. Portant haut les drapeaux des deux camps, les personnages sont jetés dans une mêlée folle où chacun est prêt à toutes les lâchetés et à toutes les compromissions pour remporter la victoire.  Là où ce texte écrit dans les années 70 m’apparaît comme particulièrement moderne, c’est dans la façon dont il dépeint la fuite en avant d’une société tout entière vouée au culte de la jeunesse éternelle et du consumérisme débridé. Une société construite sur la négation du déclin, de la maladie, de la mort, qui sont notre lot commun. Une société aussi qui tourne le dos à toute forme de solidarité et pour laquelle la notion de fragilité ne peut apparaître que comme une tare. Ce que Levin rend palpable, c’est combien une société niant notre condition mortelle s’avère au final une société mortifère.
Levin est issu du cabaret. Même dans ses grandes fresques, qu’elles soient bibliques ou mythologiques, ce pedigree lui colle à la peau. C’est la raison pour laquelle ses personnages ont par exemple la capacité de voler, de défier le temps et l’espace, sans que cela ne doive constituer une bizarrerie sur la scène. Les moyens scéniques que nous emploierons porteront donc la trace du cabaret, avec ce côté « moyens du bord », qui stimule à l’aide d’une représentation délibérément incomplète et bricolée l’imaginaire du spectateur. Au cabaret, less is more. La dimension chantée, l’usage de la musique jouée sur scène par les acteurs eux-même, avec des instruments traditionnels mais aussi d’autres plus improbables, participeront eux aussi de cette fragilité agissant comme un contrepoint à l’esprit conquérant qui anime les personnages dans la guerre qui les oppose aux autres et, en définitive, à eux-mêmes.

°°° Aucun d'entre nous n'a des fesses en plume, ma chère! Mais quand on doit se dépêcher, il faut faire avec, parce que sinon on verra aujourd'hui un fourgon noir au lieu d'une robe blanche. Suivez-moi l (elle commence à courir tandis que les autres hésitent encore. Elle fait du surplace, offrant son arrière-train à Rashèss) Allez, viens, Rashèss, viens! Rappelle-toi le temps où je te faisais courir après cette belle paire de fesses ! °°°

Préparation de la rencontre

Le metteur en scène recherche des artistes (les accents ne sont pas un problème, il ne s’agit pas d’un théâtre naturaliste) ayant des aptitudes physiques particulières, qu’il s’agira de démontrer dans le cadre de la rencontre!

Il vous est demandé pour ce premier tour:

  • de préparer une chanson
  • d’amener un instrument de musique que vous maîtrisez
  • de préparer un numéro physique de votre choix.
  • Le texte de travail est disponible sur ce lien.  Il vous est bien sûr demandé de lire la pièce avant la rencontre. Le mot de passe vous a été communiqué dans le mail d’introduction.
  • Pour le premier tour, il vous est demandé de présenter à partir de la page 79 dans le texte  » BARAGONTSÉLÉ.- Il me semble que je fais une crise cardiaque » (pour le rôle masculin) jusqu’à la page suivante « ANGEL SAMUELOV.- (guide l’âme dans son envol) Viens, viens, âme légère, petit papillon nauséabond, comme ça, c’est bien… » (pour le rôle féminin).

°°° Je les ai vus atterrir! Où sont-ils? Et toi, qu'est-ce que tu restes assis comme un moine bouddhiste? Dis-moi où ils sont! A moins que tu ne sois de mèche avec eux! Où sont-ils? Ma mère est morte! L'enterrement est à seize heures! Toi aussi, je t'invite, où sont-ils? °°°

Conditions de participation

1. Être inscrit(e) au Centre des Arts scéniques, promotions   ’15, ’16, ’17
2. Être libre aux dates de travail (répétitions et représentations)
3. Être libre toute la durée du stage et arriver à l’heure
4. Nous avoir transmis votre CV (format pdf) et une photo actualisés (format jpg) au plus tard lors de votre inscription, si cela n’a pas déjà été fait
5. Respecter la date de clôture des inscriptions

A propos de l'auteur·ice

Hanokh Levin (1943-1999), figure majeure du théâtre israélien contemporain, nous a laissé une cinquantaine de pièces de théâtre, ainsi que plusieurs recueils de poésie et de prose.
Son premier cabaret politique, Toi, moi et la prochaine guerre écrit en 1969 en réaction au triomphalisme qui suit la Guerre des Six Jours, déclenche un tollé. En 1972, il crée sa première comédie et impose déjà un théâtre singulier, fait de cruauté, d’humour au vitriol mais aussi de tendresse fondamentale.
Pouvant dès le début des années 80 travailler sur toutes les grandes scènes de son pays, il interroge de nouvelles formes d’écriture et d’images scéniques, puise dans la mythologie, façonne un théâtre épique et invente, à sa manière, une comédie (humaine) contemporaine.
Hanokh Levin est un auteur dont l’œuvre dépasse de loin les dimensions de son pays d’origine. Il a su exploiter son héritage culturel et la réalité d’un conflit qu’il vit au quotidien, pour en tirer une écriture qui va à l’essentiel, et dont l’économie n’a d’égale que la poésie. Il fait entrer dans la lumière des petites gens dont le principal problème dans la vie est la vie elle-même – surtout la leur. Empêtrés dans l’inadéquation entre leurs aspirations et les moyens qu’ils mettent en œuvre pour les réaliser, tous ses héros ont l’humanité entêtée, âpre, mauvaise, mais si naïve, si bouleversante aussi, que nous nous y retrouvons tous – touchés dans ce recoin d’enfance pleine d’espoir qui nous a échappé mais dont nous ne faisons jamais le deuil.

°°° LATSHEK.- Quand accepterez-vous de savoir que maman est morte? - SHRATZIA.- En ce qui me concerne, si c'est vraiment urgent pour toi, juste après le mariage, c'est-à-dire aujourd'hui à minuit ... Quoique demain matin, ce serait encore mieux, et si possible1 pas avant dix heures. Un temps, bref. - LATSHEK.- C'est que maman est quand même morte. - SHRATZIA.- Oui. Dommage. (elle commence à pleurer) °°°

Lieu de la rencontre

KJBi
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