Pour la première fois, La Berlue aborde le théâtre pour adolescent·e·s.
Jusqu’ici, nous avons créé des spectacles destinés à des enfants plus jeunes. Mais nous avons toujours été attentifs à ce qu’ils s’adressent aussi aux adultes qui les accompagnent.
« Saule, pieds nus dans les aiguilles » est un projet à la frontière entre le monde des adolescent·e·s et le monde des adultes.
Violette Léonard, fondatrice de La Berlue, a écrit ce texte suite à un atelier d’écriture organisé par le Théâtre de Galafronie avec Louis-Dominique Lavigne en 2011. Le texte a été lu publiquement dans le cadre du Festival Noël au Théâtre au Centre culturel Jacques Franck en décembre 2013. Une seconde lecture publique a eu lieu au Rideau de Bruxelles pendant le RRRR Festival en septembre 2015.
Est-ce un univers fantastique ? Ou la vie telle que Saule la perçoit ?
Le réalisme côtoie ici l’étrangeté, comme dans « Alice au pays des Merveilles » et « De l’autre côté du miroir », qui constituent d’évidentes références.
Entre réalité et rêve, ou cauchemar, les mondes intérieur et extérieur se confondent.
Le sujet principal de Saule, c’est la quête d’identité : la perception du monde et de soi-même dans ce monde. Saule est une adolescente, en pleine transformation.
L’adolescence, c’est ce que nous avons de plus personnel, un concentré de nous, un diamant brut pas encore dégrossi. C’est un désir de décider soi-même de sa vie, un état de perception accru, une sensibilité à vif. Une envie d’être soi sans concession, de choisir les règles et de pouvoir les changer. Une confrontation entre soi et le monde.
L’événement central de la pièce est un viol. Une violente et brutale intrusion du réel dans l’imaginaire et le symbolique, qui créée une béance dans l’univers romantique de Saule.
La structure de la pièce alterne monologues et scènes dialoguées, chacun pouvant être dans le réel ou dans l’imaginaire. Il s’agira de créer un pont entre ce qui est directement admissible comme étant « réel » et ce qui décale, dérape, dérive dans l’imaginaire.
L’étrangeté du rapport entre l’humain et l’animal sera envisagé comme allant de soi, de même que la permutation de Saule avec le Rat. Saule est une fiction pleine de symboles. Nous reviendrons toujours à la dimension du conte, qui permet d’aborder des événements extrêmes sans y perdre les dimensions poétiques ou les interprétations multiples.
Violette Léonard, auteure : « L’écriture de Saule a commencé de manière intuitive. J’ai ouvert une porte sur un univers intérieur et touché quelque chose de sensible et d’intense qui était tapi en moi. Je reconnaissais intimement ces dialogues; ils faisaient partie de mon subconscient et ils s’échappaient. Quand j’ai relu ces différentes scènes, je me suis rendue compte qu’il y avait un personnage central qui était présent dans toutes ces scènes : une jeune fille, Saule. J’ai décidé d’écrire son histoire. Entrer dans sa tête. J’ai commencé le travail d’écriture en assemblant ces premières scènes écrites et en imaginant ce qui les reliait entre elles. Des personnages sont apparus, des situations, des rapports, un univers. J’ai travaillé en plusieurs étapes, cherchant toujours à trouver la justesse du parcours de cette adolescente qui ressemble à celle que j’étais. »
Béatrice Wegnez, dramaturge : « La force de ce texte réside, selon moi, dans le fait qu’il parle de l’adolescence, de toutes les adolescences. Bien sûr, Saule traverse des épreuves difficiles : recherche du père, viol, dépression,… c’est son trajet particulier. Mais ce qui ressort également de ce texte, ce sont les états contradictoires qui traversent la jeune fille, qui sont partagés par tous les ados.
Les relations entre les êtres, ici, ne sont pas univoques, source de richesse pour les personnages et donc de jeu pour les acteurs.
Il me semble nécessaire de proposer au public une histoire où l’imaginaire, la poésie et l’humour ont une place essentielle. Le fantastique permet ici une respiration, une soupape pour le spectateur face à ces évènements traumatiques. Avec Saule, on rit, on pleure, le cœur se serre. Nous nous reconnaissons dans ces relations imparfaites, dans cette jeune fille perdue.
Parler aux ados. Parler à toutes les filles, parler à tous les garçons, parler des limites à ne pas franchir pour les uns et les autres.
Évoquer le viol et la dépression, c’est donner l’occasion de parler de la honte, de la culpabilité mais aussi d’une possible résilience. Ce terme peut concerner chacun d’entre nous. »